« On enseigne la souveraineté aux enfants de pays dominés, pendant que les vrais souverains rient dans les salons du G7. »
Chaque année, des milliers d’étudiants africains sortent diplômés de droit international. Ils apprennent les règles de la guerre, la protection des réfugiés, la compétence universelle, les conventions de Genève, les pactes des Nations Unies…
Mais que valent ces savoirs dans des États qui n’ont ni le pouvoir de les imposer, ni la volonté de les défendre ?
À quoi bon connaître les règles… si nous ne sommes pas invités à la table où elles se décident ?
Le droit international : science noble, outil inutile ?
On nous enseigne que le droit international est la clef de la paix, de la justice, du respect des peuples.
Mais qui applique réellement ce droit ?
Quand une puissance bombarde un pays sans mandat de l’ONU, le silence est assourdissant.
Quand un dictateur africain massacre son peuple, la CPI s’active…
Mais quand un allié occidental commet les mêmes crimes, on parle de « bavures » et d’« erreurs stratégiques ».
Alors quoi ?
Le droit international est-il l’arme des forts contre les faibles ?
Un outil à géométrie variable, où les États du Sud doivent obéir, pendant que les maîtres du jeu s’en affranchissent ?
Les exemples d’humiliation sont trop nombreux
- La guerre en Libye (2011) : décidée « pour protéger les civils », elle a plongé tout un pays dans le chaos… sans que personne ne soit jugé.
- Le Sahara Occidental : occupé en violation du droit international depuis 1975. Et pourtant, silence radio.
- La Palestine : chaque jour, des résolutions violées… et des cadavres ignorés.
- Les réfugiés politiques sont kidnappés sans problème
Pendant ce temps, les étudiants en droit international récitent des articles que même les États puissants et les régimes dictatoriaux ne respectent pas.
Former à la justice dans un monde d’impunité
L’Afrique regorge de juristes brillants, de professeurs passionnés, de défenseurs des droits humains.
Mais ils se heurtent à des régimes qui piétinent la Constitution, à des armées qui violent les conventions, à des chefs d’État qui méprisent les engagements internationaux dès qu’ils menacent leur pouvoir.
À quoi bon former des soldats du droit, si le champ de bataille est miné par le cynisme, la corruption, la lâcheté ?
Il ne s’agit pas de mépriser le droit international.
Il s’agit de le reconquérir. De ne plus se contenter de réciter, mais d’agir, dénoncer, désobéir, internationaliser nos luttes.
Nos universités doivent cesser d’être des lieux de reproduction de l’impuissance juridique, et devenir des laboratoires de combat politique.
Le droit international ne doit pas être seulement une discipline académique, mais une arme des peuples.
Conclusion : quand le droit devient une parodie, la révolte devient un devoir
Le droit international tel qu’enseigné ne vaut rien s’il n’est pas soutenu par une volonté politique, une souveraineté réelle, une capacité d’action.
Former des juristes pour les jeter dans un monde où leur science n’a aucun poids, c’est former des otages.
Alors posons-nous la vraie question :
Nous enseignons le droit international à nos jeunes…
Mais leur apprenons-nous à se battre contre l’ordre international qui les méprise ? C’est la grande question que je nous demande d’y réfléchir
BADIROU Le panafricain
